On attendait quatre bateaux dans le sas à 18 h. En fait, L'Hermione est rentrée à 20 h, après avoir failli rester en rade. Une arrivée suivie avec ferveur par des milliers de spectateurs.
Tout le monde attendait son passage de l'écluse avec les grands bateaux malouins : L'Hermione a failli manquer le rendez-vous, en passant le sas à 20 h.
Sur le papier, le programme était séduisant : L'Hermione accueillie vers Fréhel et accompagnée jusqu'à Saint-Malo par toute une flottille, notamment L'Étoile du Roy, Le Renard, Étoile Molène, et même La Cancalaise. Avec un temps fort : le passage de quatre bateaux dans le sas à 18 h.
Mais les choses ne se sont pas passées ainsi... Vers 17 h, les silhouettes grisâtres de L'Hermione et de L'Étoile du Roy se devinent au loin dans la baie de la Fresnaye, où la frégate de La Fayette est au mouillage, dans un simulacre de canonnade au pied de Fort La Latte. Pour quelques spectateurs privilégiés embarqués.
Avec environ huit milles à parcourir, et une manoeuvre de remontée de l'ancre qui prend beaucoup de temps, il est évident que le navire ne sera pas dans les délais. Alors que L'Étoile du Roy repart et passera normalement le sas. Il se présente une autre possibilité pour 18 h 47, après la sortie d'un chimiquier.
Mais, là encore, déception pour les milliers de spectateurs, qui attendent depuis 17 h au Bastion de la Hollande, au môle des Noires, à la cité d'Aleth, ou encore sur le promontoir de Dinard.
Coup de théâtre
Entouré d'une quantité de bateaux à moteur, L'Hermione reste en rade, au propre comme au figuré. Explication avancée : le vent serait défavorable. Pourtant il est dans l'axe : portant, d'ouest, et d'une petite quinzaine de noeuds. La hauteur et la longueur du bateau, ainsi que l'importance de son gréement, offrent une surface de fardage considérable, qui limite sa capacité de manoeuvrabilité.
Nouveau coup de théâtre : alors qu'on ne s'y attendait plus, le capitaine du navire décide de rentrer à 20 h pour s'amarrer au pied des remparts, dans le bassin Vauban. D'ici son départ pour Brest, le 9 juillet, un certain nombre d'animations sont prévues, outre les visites à bord. Les cérémonies officielles qui étaient prévues ont été reportées à la soirée du 8.
Autre déception, que beaucoup de plaisanciers n'ont pas cachée : malgré la lumière magnifique et la silhouette de l'Hermione, son arrivée sans les voiles a manqué de panache. Heureusement, Le Renard et La Cancalaise avaient sauvé la mise dans l'après-midi.
Ils étaient nombreux à attendre L'Hermione : Malouins, passionnés ou simples touristes. La longue attente sous le mauvais temps a finalement laissé place à l'émerveillement.
« Elle vient ou elle s'en va ? On se pose la question ! », lance une impatiente à son mari, sourire aux lèvres.
C'est que L'Hermione s'est fait attendre. Capuches sur la tête, cirés et doudounes enfilées, les observateurs étaient nombreux sur les remparts et la digue, malgré le vent et la pluie. « Tant que le temps reste gris, ça ira mais il ne faudrait pas que cela se dégrade, espère un couple de Dinan, passionné de bateaux et d'histoire. On l'a appris à la dernière minute, mais on a décidé de venir quand même. »
À côté, un papa relate l'histoire de L'Hermione. Les enfants ne sont pas loin : « C'est la virée du début des vacances ! Nous irons visiter le navire après. »
« Il est là-bas, je le vois ! »
Pour faire patienter le public, des accordéonistes jouent quelques airs. On aperçoit ici et là des gens costumés à la façon du XVIIIe siècle. Les sourires sont de mise, mais les regards restent rivés sur l'horizon.
17 h 20. « Il est là-bas, je le vois ! Tu veux qu'on se rapproche ? » Enfin, les voiles de L'Hermione apparaissent au loin. Déjà sortis depuis une bonne heure, les appareils photo et autres portables prennent du service. L'émerveillement se lit sur les visages, d'autant plus que le soleil montre le bout de son nez.
« Déjà majestueux de le voir à l'oeuvre ! »
Mais très vite, des rumeurs circulent sur une arrivée différée, le bateau restant longtemps immobilisé. Le pessimisme l'emporte rapidement et une bonne partie du public commence à quitter les lieux. Certains semblent déçus comme Élisabeth, retraitée malouine : « Je n'étais pas au courant que L'Hermione ne rentrerait pas maintenant, souffle-t-elle. Je reviendrai demain s'il le faut ! Mais c'est dommage pour les touristes. » En place depuis 9 h, Patrick Pérot, bénévole, abonde dans ce sens : « Certaines personnes ne seront peut-être pas là demain pour le voir de près... »
C'est le cas d'Élizabeth et Christian, un couple venu spécialement de Broons (Côtes-d'Armor) pour l'occasion. Encore plein d'étoiles dans les yeux, la jeune femme relativise : « C'était déjà majestueux de le voir à l'oeuvre ! » « On aurait bien voulu le voir de près mais c'est déjà super ! », surenchérit son compagnon.
Les plus patients ont pu finalement assister au passage du sas et à l'amarrage de l'Hermione.
L’Hermione est un navire de guerre français en service de 1779 à 1793. C'est une frégate de 12 (en référence au calibre de ses canons) portant 26 canons de 12 livres et 6 canons supplémentaires de 6 livres. En jargon naval on la dénomme « frégate de 26 canons », bien qu'à l'origine elle en ait porté 34. Elle fait partie des frégates de la classe Concorde, construites à partir de 1777 à l'arsenal de Rochefort.
Elle est connue pour avoir conduit pour sa deuxième traversée le marquis de La Fayette aux États-Unis en 1780, lui permettant de rejoindre les insurgés américains en lutte pour leur indépendance.
C'est la seconde frégate portant ce nom mythologique dans la Marine française. Une troisième Hermione est construite sous le Premier Empire à l'arsenal de Lorient par la société des frères Crucy.
Une réplique de l’Hermione de 1779 est construite à Rochefort à partir de 1997 et lancée en eaux salées le 7 septembre 2014.