Rétrospective 2009 #3 : Cinéma - a photo on Flickriver

Rétrospective 2009 #3 : Cinéma

C'est toujours un exercice délicat que de choisir une photo comme support à une rétrospective cinéma. Cette année, mon choix s'est porté sur une photo très politique, comme le sont beaucoup de films que j'ai retenus ci-après, et plus généralement comme l'année telle que je l'ai vécue. Une photo peut être un peu racoleuse, mais le racolage étant ici un moyen de contribuer à donner une chance à des films dont certains sont peu diffusés et sous-médiatisés.

Je commencerai par évacuer les gros films d'Art et Essai de l'année (C. Eastwood, P. Almodovar, W. Allen, Q. Tarantino, M. Mann...), ceux dont vous avez forcément entendu parler. Tous de bons films, même si ce n'est pas leur meilleur. Et je n'ai rien de spécial à ajouter à tout ce que j'ai pu lire sur eux.

Passons donc tout de suite aux films qui me tiennent le plus à coeur.

Je commencerai par un genre de cinéma qui est dramatiquement sous-représenté, tant en terme de diffusion (nombre de copies, durée de projection en salle,...) que de relais médiatique : le documentaire. Dans une période où les médias dominants imposent une vision réductrice du monde, les longs métrages documentaires apportent, en prenant le temps de la durée, des éclairages alternatifs sur les problèmes du monde, et en assumant souvent une subjectivité affirmée. Cette soudaine passion pour le documentaire n'est pas étrangère à lecture de l'essai de Dominique Baqué (cf rétrospective Livres).

Sans respecter d'ordre particulier, je citerai, dans mes "nominés" du documentaire :

Rachel de Simone Bitton, excellent enquête sur la mort de Rachel Corrie, militante américaine décédée lors de sa lutte contre l'occupation israélienne en Palestine. Un film dont j'ai déjà parlé longuement ici

Walter, Retour en résistance de Gilles Perret, que j'ai vu deux fois, la 2nde fois en présence du personnage principal du film (Walter Bassan) et du producteur. Un film, qui à travers le portrait d'un ancien résistant et son travail de mémoire, montre les contradictions de la période actuelle. Un film qui dénonce le double-jeu d'un gouvernement qui célèbre en facade la résistance, mais démantèle - bruyamment ou discrètement, mais toujours méthodiquement - tout ce que la résistance a mis en place après la guerre, pour éviter au fascisme de renaître. J'en reparlerai plus longuement bientôt, avec quelques photos prises pendant le débat qui a suivi le film

Ma mondialisation du même réalisateur. Bâti autour du portrait d'un sympathique PDG d'une grosse PME de décolletage savoyarde, le film brosse un passionnant panorama des transformations du capitalisme pendant les 30 dernières années. En bonus de ce film que j'ai vu en DVD, une interview de Frédéric Lordon, aussi captivant à entendre qu'à lire

Alimentation générale de Chantal Briet. A l'opposé de la caricature habituelle des banlieues, la réalisatrice signe un film attachant sur les personnages qui gravitent dans et autour d'une épicerie, au milieu de grands ensembles de la banlieue parisienne. Un travail admirable, sur la durée (tournage étalé sur 4 ans) aux antipodes des reportages "coup de poing" en période de crise.

Let's make money de Erwin Wagenhofer. Une fresque historique et planétaire de la mondialisation à l'oeuvre. Un travail salutaire pour un regard et une analyse qui fournissent un bon antidote aux discours dominants

J'ai très mal au travail de Jean-Michel Carré. Si vous êtes rentier, en retraite, où que vous n'êtes pas encore arrivés sur le marché du travail, n'allez pas voir ce film, vous vous feriez du mal pour rien. Sinon, il remplacera avantageusement les anti-dépresseurs que vous prenez habituellement pour supporter l'insidieuse torture du travail "moderne".

Rue Santa Fé de Carmen Castillo. Il serait injuste d'évoquer ce film en seulement quelques mots. Je reviendrai bientôt avec quelques photos de la réalisatrice, icône de la résistance à la dictature de Pinochet

En dehors du documentaire, beaucoup de films m'auront marqués cette année :

Welcome de Philippe Lioret. Un film qui donne envie d'adhérer à RESF et d'héberger un sans-papier. Vincent Lindon est toujours un acteur admirable

L'armée du crime de Robert Guédiguian. Un grand Guédiguian, du niveau de "La ville est tranquille". Un film que j'ai évoqué ici, qui pose, entre autres, la question du prix à payer d'un engagement militant fort. Pour Guédiguian, qui était présent pour débattre après la projection, son film interroge aussi, non pas sur ce que nous aurions fait à la place de ces résistants de la 1ère heure, mais plutôt ce qu'ils feraient à la nôtre.

Un prophète de Jacques Audiard. Une magnifique leçon de cinéma, même si certains ont reproché certaines libertés avec la réalité du monde carcéral, encore plus noire que le film.

Hunger de Steve Mc Queen (homonyme de l'acteur). Toujours la prison, celle de Maze où étaient détenus les militants de l'IRA. Le récit âpre de la grêve de la faim de Bobby Sands et de ses équipiers et sa dramatique conclusion, face à une Margaret Thatcher inflexible.

Le ruban blanc de Michael Haneke. Une photographie noir et blanc éblouissante. Chaque plan est un petit chef d'oeuvre de composition, de cadrage et de lumière. Les plans s'enchaînent tous avec la maestria d'une fugue de Bach. A noter aussi, une scène de rupture conjugale qui bat tous les records de violence froide. Sur le fond du film en revanche, je suis extrêmement réservé sur la thèse de Haneke, qui apparaît en filigrane, donnant une vision psychologisante et donc ultra-réductrice des causes de la montée du nazisme

United Red Army de Kôji Wakamatsu. A travers l'histoire de la Fraction Armée Rouge japonaise, 3 heures d'un crescendo de violence, pour convaincre, si cela était encore nécessaire, des dérives sectaires et de l'impasse des mouvements d'avant-garde révolutionnaire et de la lutte armée. Malgré tout, je suis sorti de la salle étonné par les moyens planétaires mis en oeuvre pendant 40 ans par les polices mondiales, pour traquer les leaders de la FAR nippone, à côté de l'impunité actuelle des responsables de la crise financière dans laquelle nous sommes.

Louise-Michel de G. Kervern et B. Delepine. Je l'ai déjà évoqué dans ma rétrospective 2008 (le film était sorti entre Noël et le jour de l'an). J'ai acheté le DVD à sa sortie. Des ouvrières licenciées après la délocalisation en secret de leur usine textile, décident, entraînée par une Yolande Moreau excellente, de mettre en commun leur dérisoires indemnités de licenciement pour engager un tueur à gages et faire "buter le patron". Par l'équipe de Groland, dans une veine toujours aussi déjantée et jubilatoire !

Le Temps qu'il reste de Elia Suleiman. Magnifique chronique, à la fois historique et intime, pleine de poésie subversive, d'une vie de Palestinien en Israël, de 1948 à nos jours

Adieu Gary de Nassim Amaouche. Pour JP Bacri que j'adore. Mais aussi pour un film subtil sur les mutations du monde ouvrier, entre deux générations, au milieu d'une cité ardéchoise fantôme

Avida de G. Kervern et B. Delepine. Un DVD acheté dans la foulée de Louise-Michel. Bel exercice de style pour un hommage Noir et Blanc aux films surréalistes, Une invitation réussie au "lâcher prise"

Léger tremblement du paysage de Philippe Fernandez. Je suis heureux d'avoir pu contribuer, même modestement, à permettre la projection de ce 1er long métrage inédit sur Lyon. Un film atypique, qui refuse de raconter une histoire, de traiter de psychologie, pour s'intéresser au rapport au monde de plusieurs personnages dont les trajectoires se croisent.

Irène de Alain Cavalier. Un film très émouvant, dont j'ai déjà parlé ici. La preuve qu'il est possible de faire un cinéma passionnant, avec un budget correspondant à la première seconde d'un blockbuster américain.

Tu n'aimeras point de Haim Tabakman. Chapeau à ce réalisateur israélien, pour le défi de réussir à raconter, avec beaucoup de subtilité, une relation homosexuelle dans le milieu juif orthodoxe

Fish Tank de Andrea Arnold. Un portrait touchant d'une adolescente rebelle et de son processus de maturation, au milieu d'une famille plus décomposée que recomposée

A côté de ces sorties récentes, j'ai aussi eu le plaisir de découvrir quelques grands classiques du patrimoine cinématographique :

Grâce à Jean-Francois et ses précieux talents de passeur, La nuit du chasseur de C. Laughton et La vie est belle de F. Capra.

Lors de la rétrospective Truffaut à l'Institut Lumière, Jules et Jim et La chambre verte.

Pour finir sur une note légère, je citerai deux films :

Good Morning England de Richard Curtis. Un bon vieux "Feel Good Movie", sans prétention, qui raconte l'aventure d'une des premières radios libres anglaises. Sea, Sex and Rock 'n roll !!!

Be happy de Mike Leigh. Pour la bonne humeur contagieuse de Sally Hawkins. Et surtout pour l'inoubliable scène de la leçon de Flamenco.

Pour conclure (si vous êtes encore là), j'espère que les menaces qui pèsent sur l'Art et Essai à Lyon (et malheureusement ailleurs aussi) n'empêcheront pas de voir d'autres films de ce type en 2010. J'en profite pour saluer l'admirable travail de Marc Artigau pour la programmation qu'il a dirigé au sein des cinémas CNP pendant toutes ces années, contre vents et marées, jusqu'à son licenciement pour de soit-disant fautes graves. Le maintien d'une telle programmation va être de plus en plus un combat. Une lutte à laquelle j'ai décidé de contribuer en participant activement à la création de l'association "Enjeux sur image". Une histoire à suivre...

Taken on: July 22, 2009

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Camera: Canon EOS 400D, f/8.0, 1/200 sec, 70mm, ISO 100 (more info) (hide info)

Camera:	Canon EOS 400D
Lens:	70.0-200.0 mm
Aperture:	f/8.0
Exposure Time:	0.005 sec (1/200)
Focal Length:	70mm
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Exposure Bias:	0 EV
Flash:	Off, Did not fire
Exposure Program:	Shutter speed priority AE
Exposure Mode:	Auto
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White Balance:	Manual
Color Space:	Uncalibrated
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